Installé à Nîmes, Gérard Guégan publie un livre de souvenirs, « Le chant des livres », où se croisent lors de brefs instantanés Jean Paulhan, Jean Giono, Henry Miller ou Maurice Thorez
Comment est née l’envie de ce livre de souvenirs ?
Entre neuf et treize ans, j’ai été un lecteur acharné de la série Contes et légendes. Au fond, ce sont des légendes que j’écris. Même la réalité, je la tire à moi, je la transforme. Brusquement, j’ai repensé à Jean Paulhan. Depuis longtemps, j’avais envie d’écrire en quelques lignes le court tête-à-tête que j’ai eu avec lui.
Jean Paulhan était né à Nîmes. Que représentait-il pour vous à l’époque ?
Paulhan, c’était d’abord lié aux Lettres françaises. Un pasteur protestant, qui était le père d’une petite amie, se moquait souvent de mon aveuglement pour le communisme. C’est lui qui m’a conseillé de lire Paulhan. J’ai tout de suite trouvé ça remarquable. En plus, il y avait tout ce que je lisais sur lui. On l’appelait l’éminence grise des éditions Gallimard, qui étaient le centre de la vie intellectuelle française.
Ce qui m’a plu dans les années 1960, c’est quand, contre toute attente et contre l’avis de Gaston Gallimard, il a décidé de se présenter à l’Académie française. C’était très chic de lire Paulhan, quand on avait 18 ou 20 ans, même si on était communiste. On aurait dû être plus ou moins hostile et on ne l’était pas. À nos yeux, il avait tout vu.
C’est la première personnalité que vous rencontrez quand vous arrivez à Paris…
Je crois plus au hasard qu’à la réalité et à la légende plus qu’au roman vrai ! Maurice Thorez m’ouvre la porte de L’Humanité. J’arrive à Paris, j’avais rendez-vous avec Jean-Jacques Schull. Il arrive avec un ami, dont je ne sais rien, Frantz-André Burguet. Je suis intrigué par son prénom, je suis vraiment provincial… Il nous dit qu’il doit passer voir Georges Lambrichs chez Gallimard et nous propose de l’accompagner. Schull ne vient pas. Lambrichs n’est pas là. Burguet demande s’il y a encore quelqu’un à la NRF et la standardiste nous dit que Paulhan arrive.
C’est le personnage le plus inattendu, dérangeant, perspicace, étonnant. Toutes les qualités qu’on peut donner à un esprit curieux. On parle de L’Humanité, d’Aragon. Il me demande si j’ai un poète préféré, je réponds Rimbaud. Il va me donner ma première leçon : « Si un jour vous écrivez des poèmes, n’imitez surtout pas Rimbaud, n’imitez pas ce que vous aimez, imitez ce que vous pensez ne pas aimer ». C’est l’esprit de Paulhan, le côté réboussaïre, cette envie de titiller l’intelligence de l’autre, savoir ce qu’il y a derrière la façade.
Avant Paulhan, pendant votre enfance, vous avez rencontré Jean Giono…
C’est un professeur qui fumait sans arrêt. Il faisait une thèse, on ne savait pas très bien ce que c’était. J’avais un ami, on était des casse-burnes, parfois des paresseux. Mais ce prof rendait visite régulièrement à Giono qui était très preneur de ces rencontres. On se retrouve face à quelqu’un qui aime la jeunesse, qui a envie de lui parler, qui ne se scandalise pas de ma grossièreté quand je dis « vaffenculo ».
C’est plus tard que je l’ai vraiment lu, en ayant pendant quelques années, avec une sorte de réserve. Je n’avais plus envie d’être méridional. On voulait être allemand, anglais, américain…
Justement, la littérature américaine a beaucoup d’importance…
L’Amérique arrive par la musique. J’ai été membre du Hot Club de France. C’est ma première adhésion et ma première exclusion, parce que j’écoutais du jazz qui n’était pas New Orleans mais West Coast. J’ai toujours eu des procès, des ennuis avec l’autorité. Ensuite, il y a eu le choc total du rock’n’roll. En même temps, à côté, on pouvait lire Kafka, ce qui étonnait tout le monde, on mélangeait tout.
J’ai essayé de retrouver cette contradiction. Mon attirance pour le communisme allait de pair avec l’Amérique. Ce qui est invraisemblable, c’est la manière dont aujourd’hui, on décrit cette époque. Le stalinisme était fini. Évidemment, nos dirigeants auraient préféré qu’on lise autre chose mais ces écrivains américains étaient plutôt engagés.
À l’époque la littérature avait une place qu’elle n’a plus du tout…
C’était capital. Même quand on draguait, la littérature était fondamentale. On classait les gens en fonction de ce qu’ils lisaient. C’est pour cela que quand je rencontre Paulhan, je suis au 36e étage. Si j’avais été plus intelligent, peut-être aurais-je dû revenir le voir ?
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